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Le deuil après un suicide est un deuil à part, sans doute parmi les plus difficiles à vivre. La violence de la mort et le choc, notamment lorsque la personne endeuillée à découvert le corps, peuvent engendrer un syndrome de stress post traumatique, avec des flashs récurrents qui font revivre le traumatisme et un état d’anxiété chronique.

Entre quête de sens et culpabilité

Lors d’un deuil suite à un suicide, l’intensité des émotions se démultiplie et peut durer dans le temps. Une question revient de manière lancinante chez les endeuillés : pourquoi ce geste ? Cette remise en question devient alors obsédante et dévorante, surtout lorsqu’il s’agit du suicide de son enfant, de son conjoint ou de son parent.

L’entourage endeuillé pense devoir trouver une explication, un sens et des réponses à ce geste pour faire son deuil. « Le suicide est un acte complexe et les causes sont souvent plurielles. Aussi, il faut arriver à se dégager de la culpabilité, de la responsabilité pour avancer dans le processus de deuil, en acceptant de ne jamais avoir de réponse claire et définitive, en acceptant la décision du défunt même si on ne la comprend pas et si on ne la comprendra jamais. » prévient Hélène Romano, psychothérapeute spécialisée.

Le sentiment de culpabilité, présent dans la majorité des deuils, est décuplé dans le cas d’un deuil suite à un suicide. Consciemment ou inconsciemment, les proches du défunt vont prendre la responsabilité de son acte. « Comme il s’agit d’une mort intentionnelle, les proches sont toujours persuadés qu’ils auraient pu faire quelque chose, qu’ils auraient pu empêcher l’irréparable. » explique la psychothérapeute.

Si vous avez besoin d’aide, différentes formes d’accompagnements sont possibles et pourront vous apaiser.


Des conduites à risques à ne pas négliger

Faire le constat du suicide d’un proche est difficile, mais il marque le début du cheminement du deuil. Lorsque celui-ci est bloqué, les endeuillés peuvent développer des troubles psychotiques et des comportements à risques, qui caractérisent les deuils compliqués ou pathologiques. Persuadés qu’ils auraient pu faire quelque chose, ils font face à un fort sentiment d’échec, une terrible remise en question et une perte de l’estime de soi.

Dans les cas les plus extrêmes, les endeuillés s’interdisent d’être heureux et de poursuivre leur vie ! Cette condition peut alors conduire à des tentatives de suicide, lors desquelles l’endeuillé exprime son besoin de « rejoindre » le défunt. « Non seulement le risque de dépression est réel, mais il n’est pas rare qu’apparaissent des risques suicidaires. Le passage à l’acte est courant chez les proches de suicidé. » assure Hélène Romano.

À lire : Deuil compliqué : comment le reconnaître ?

Une longue colère envahissante

Le deuil après un suicide se caractérise également par une phase de colère plus intense et plus longue. Cette colère est généralement tournée contre la personne qui s’est suicidée, mais elle peut aussi se retourner contre soi tant la culpabilité l’emporte. « Dans le cas d’un suicide, comme de toutes les morts très particulières, les étapes du deuil sont à prendre avec beaucoup de pincettes et de recul car elles sont beaucoup plus étalées dans le temps, diffèrent selon les personnes et leur intensité est beaucoup plus forte. » prévient la psychothérapeute.

Ainsi, dans un deuil après suicide, l’acceptation et l’adaptation à cette nouvelle vie sans le défunt prend plus de temps que dans un deuil normal et nécessite généralement un accompagnement ou un suivi thérapeutique.

Le saviez-vous ? Pour débloquer un processus de deuil, il existe plusieurs thérapies comme l’EMDR, l’EFT ou encore l’ICV.

En finir avec la honte pesante

Dans le cas d’un suicide, au chagrin de la perte viennent s’ajouter le malaise, l’impuissance et la honte. « Dans nos sociétés judéo-chrétiennes, le deuil après un suicide n’est toujours pas reconnu. Jusqu’au début du XXème siècle, les proches d’un défunt par suicide étaient mis au ban de la collectivité. Le suicide était une honte et le tabou persiste encore de nos jours.

Lire aussi : « Mon psy », le dispositif gouvernemental qui rembourse huit séances chez un psychologue partenaire. 

Ce rejet sociétal est une blessure psychique immense pour ceux qui restent. Pour sortir de ce tabou, de cette honte, il est important de pouvoir dire le mot « suicide » et qu’il soit reconnu dans les démarches qui suivent. » analyse Hélène Romano. Ce sentiment de honte est mortifère car il empêche les proches de parler du défunt et des circonstances du décès. Ils s’enferment alors dans un silence amplifiant leur sentiment de solitude et de malaise.

Toutefois, certains proches vivent le suicide de façons très diverses. Il peut arriver qu’ils éprouvent un soulagement car cette mort met souvent un terme à des années de souffrance. « Ce soulagement peut être difficile à assumer… alors qu’il n’y a pas lieu d’en avoir honte. » assure la psychothérapeute.

Lire aussi : Deuil pathologique : quand faut-il s’inquiéter ? 

Se faire aider pour s’apaiser

Après un suicide, les démarches administratives sont très longues. La réalisation d’une enquête avec autopsie aggrave souvent la détresse bien que celle-ci aide à comprendre les circonstances du décès. « Les questions posées lors de l’enquête peuvent permettre à l’entourage de trouver un sens. Malheureusement, les enquêteurs sont assez peu formés et les questions sont parfois inappropriées pour un proche endeuillé. »

Il est absolument primordial que les personnes endeuillées puissent se faire aider psychologiquement par un thérapeute spécialisé. Il ne faut pas hésiter, non plus, à se rapprocher des associations de proches de suicidés qui ont vécu le même parcours, la même douleur. Le chemin du deuil après une mort par suicide est long, très long, mais il est possible avec un suivi et un accompagnement adapté. Enfin, si vous ressentez le besoin de parler, il existe des groupes de parole de deuil.

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