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Audrey Mouge est journaliste et auteure française, également thérapeute holistique et praticienne en chamanisme. Vinicius Jibhajan, quant à lui, est musicien, auteur-compositeur et musicothérapeute brésilien. Le couple s’est rencontré lors d’une cérémonie chamanique à São Gabriel, il y a deux ans. Interprétant ensemble un chant sacré, leurs voix ont, disent-ils, « commencé à danser, se sont entrelacées et unies pour ne faire qu’une ». Un moment magique annonçant le début d’une belle collaboration.

Audrey qui, déjà à l’époque explorait le pouvoir thérapeutique des sons et du chant, à travers le chamanisme, mais également sa puissance pour favoriser l’ouverture de l’Être à des dimensions plus élevées de la Conscience, accompagne désormais Vinicius, lors des séances individuelles de musicothérapie à domicile. Audrey assiste aussi bénévolement Vinicius quelques après-midis par mois à l’hôpital de l’enfant de Brasilia (HCB). Grâce à la musique, ils apportent aux patients comme à leurs proches, de la joie, de l’amour, du réconfort et un apaisement.

La musicothérapie dans les hôpitaux au Brésil, c’est courant ?

Vinicius : La musicothérapie a été reconnue comme une médecine intégrative dans les hôpitaux en 2016. Mais sa pratique en milieu hospitalier n’est pas nouvelle. Après avoir longtemps travaillé auprès de malades en phase terminale, j’ai ouvert mon cabinet de musicothérapeute à l’hôpital de l’enfant de Brasilia il y a sept ans. La musicothérapie fait partie des soins proposés pour favoriser le bien-être des patients, comme en France, l’acupuncture ou la sophrologie.


En quoi la musicothérapie peut-elle guérir ?

Audrey : La musique crée un lien entre les êtres, nous connecte de cœur à cœur. Elle peut susciter aussi bien de la joie qu’un grand apaisement, selon les mélodies et la fréquence utilisées. Elle peut également aider à libérer des émotions et constitue un outil particulièrement efficace pour accéder à cet espace sacré que nous avons en chacun de nous. Ces états aident à réveiller ses propres mécanismes d’auto-guérison.

Vinicius : De nombreuses études scientifiques ont prouvé les effets positifs de la musique sur le corps. Le son émis agit à différents niveaux, à la fois sur le cerveau, le métabolisme et les cellules. Cela s’explique par la composition de notre corps : notre organisme contient en moyenne 65% d’eau. Or, l’eau est magnétisable et répond aux fréquences. En travaillant avec la musique, on peut agir au niveau physique, mental, émotionnel mais aussi spirituel. J’ai remarqué qu’au fil des séances, les patients s’ouvraient à des croyances, qu’elles soient religieuses ou spirituelles. Beaucoup de patients, dans leurs derniers moments de vie, désirent apprendre à méditer, à prier. L’ouverture à ce monde subjectif les aide à traverser l’épreuve de la maladie, leur donne plus de force pour se battre. Cela créé un chemin favorable à la guérison.

De quelle manière intervenez-vous auprès des malades ?

Vinicius : A l’hôpital de Brasilia, les enfants viennent dans mon cabinet et peuvent jouer de nombreux instruments, composer de la musique, chanter. Pour eux, la musicothérapie est un formidable moyen d’expression. Ils peuvent libérer leurs émotions, développer leur créativité, maintenir leur désir. Je me souviens d’un adolescent de 15 ans, qui se savait condamné, et qui voulait absolument apprendre le piano. A la fin, je me rendais dans sa chambre et il continuait à jouer. Il a composé un morceau magnifique que j’écoute encore…

Audrey : Avec Vinicius, nous nous rendons aussi au domicile de personnes très malades. Chaque séance est différente. Nous laissons parler notre intuition, en fonction de nos perceptions. On se met naturellement au diapason. Les instruments ou les chants choisis varient d’une personne à l’autre en fonction de notre ressenti. Certains patients ont besoin d’être stimulés, d’autres apaisés… Vinicius joue de la guitare, de la kalimba (instrument africain) ou encore du bansouri, flûte traversière indienne en bambou. J’ai quant à moi toujours mon tambour et une maraca. Nous chantons aussi bien des chants sacrés en portugais ou en espagnol que des mantras, en sanskrit ou en tibétain. Les mots – même si on ne les comprend pas, leurs phonèmes ont le pouvoir d’agir sur notre système physique, émotionnel, mental et spirituel, activant des zones du cerveau qui rééquilibre tout notre système énergétique. Parfois avant de commencer la séance, je peux également, de façon intuitive, utiliser des sons qui expriment une émotion que je ressens chez la personne et ainsi l’aider à l’en libérer. Parfois ces sons deviennent au fil de la séance un chant mélodieux, signe pour moi que quelque chose a été « réharmonisé ».

Vous déplacez-vous à la demande des malades ou de leurs proches ?

Audrey : Souvent, nous intervenons à la demande des proches. Pour l’un des jeunes hommes que nous accompagnons, ce sont ces amis bouddhistes qui nous ont demandé d’intervenir. Au départ, ses parents, tous deux médecins n’étaient pas favorables à la musicothérapie. Mais les résultats positifs de nos séances les a fait changer d’avis… Nous les avons peu à peu apprivoisés. Parfois, les proches participent aux séances. Cela leur fait beaucoup de bien aussi. Ils entrent en état méditatif. Et lorsque la séance est rythmée par des musiques populaires brésiliennes, comme pour Sâtiro (autre photo) qui a besoin de la musicothérapie pour retrouver la joie et la mémoire depuis un AVC, il arrive que certains membres de la famille dansent, s’emparent d’un instrument. Tout le monde participe.

La musicothérapie peut-elle aider dans les derniers moments de vie ?

Audrey : Quand nous avons suivi une personne un certain temps et qu’il est l’heure pour elle de quitter ce monde, il nous arrive de l’accompagner via la musicothérapie. Parfois on fait appel à nous juste pour aider des personnes à « faire le passage », comme on dit ici. Je ressens souvent chez elles la peur de partir. Les mantras sont très efficaces dans ces moments-là, pour les tranquilliser, les aider à lâcher prise. Parfois, on sent qu’une partie d’eux seulement les habite, l’autre est déjà ailleurs. La musique, les chants, les prières peuvent les aider à « se réunifier » une dernière fois et ainsi trouver la force de passer, en douceur, de l’autre côté. C’est un moment furtif où l’on ressent un regain d’énergie soudain.

Vinicius : Si la musique favorise le processus d’acceptation et une certaine légèreté chez le patient, j’ai remarqué qu’elle agissait aussi au niveau vibratoire sur l’entourage. Elle apporte de l’apaisement, facilite l’acceptation et rend le passage moins douloureux pour le malade et ses proches.

Quelle vision avez-vous de la mort ?

Audrey : Je ne vois pas la mort comme une fin mais le début d’un nouveau cycle. Parfois quand les personnes souffrent beaucoup et sont très affaiblis, elle est indiscutablement une libération. Selon les traditions spirituelles asiatiques, la mort dans un monde est simultanément une naissance dans l’autre monde. Et réciproquement. Je partage complètement cette idée, c’est ainsi que je ressens la mort. J’ai d’ailleurs parfois l’impression de jouer le rôle d’une sage-femme et d’aider les personnes en fin de vie à naître dans l’autre monde.

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