Un évènement, une histoire à partager à la communauté Happy End ? Je partage mon témoignage

Lorsque Natacha, la maman de Yonah, Morgane et Roman Malo tombe malade au cours de l’été 2021, leur père est déjà décédé depuis neuf ans. La fratrie doit alors affronter seule l’épreuve de la maladie. “On a su rapidement qu’on allait perdre notre mère car son pronostic vital était engagé. Le sujet de la garde de notre sœur qui avait 13 ans à l’époque était ce qui nous inquiétait le plus. Il fallait agir vite. Or, entreprendre des démarches pour obtenir une tutelle parentale et savoir à qui s’adresser était un parcours du combattant. » explique Roman. Sans compter une autre problématique de taille, que Roman Malo et ses sœurs n’ont pas l’habitude de partager : une précarité extrême, aggravée par plusieurs années de dettes.

Ma mère avait 30 € sur son compte quand elle est décédée

“Lorsque notre mère est décédée, seulement un mois après son hospitalisation, elle n’avait que 30 € sur son compte bancaire. Moi, je n’avais presque pas de quoi payer le loyer de mon appartement étudiant.” Face à cette situation sans issue, Manon, la petite-amie de Roman, lui propose alors de créer une cagnotte Paypal pour financer les obsèques. Une idée difficile à envisager pour Roman. “J’ai toujours essayé de cacher notre détresse financière”, avoue-t-il. “J’en parlais très rarement, voir pas du tout. J’ai réussi à intégrer un parcours académique correct et j’ai toujours fait belle figure. Au décès de ma mère, j’ai réalisé que malgré tous mes efforts, lorsque tu es dans la précarité, on va te le rappeler jusqu’à ta mort.” 


Une cagnotte en ligne va les aider à obtenir la garde Yonah 

Pour pouvoir offrir un enterrement digne à leur mère, la fratrie va faire ce qu’elle n’avait jamais fait auparavant : révéler au grand jour l’ampleur de leur détresse. Ils se confient alors sur leur quotidien dans un logement rarement chauffé, leur habitude de sauter les fêtes d’anniversaire d’ami.e.s pour ne pas avoir à venir les mains vides ou encore les excuses inventées lorsque des amis croisent leur mère au Secours catholique. Émus par leur histoire, des centaines d’individus participent à leur cagnotte, intitulée Offrir un enterrement digne à Natacha et soutenir ses 3 enfants. La somme de 70 000 € est récoltée rapidement. Un montant inespéré pour la fratrie, qui a aidé Morgane à obtenir la garde de Yonah. “Initialement, ce qu’on souhaitait avec cette cagnotte, c’était organiser des obsèques à la hauteur de tout ce que notre maman a fait pour nous. Mais finalement, on a aussi pu assurer au juge des affaires familiales qu’on était capables d’offrir un train de vie décent à Yonah.” 

Morgane est donc orpheline, boursière et étudiante avec une enfant à charge

Désormais, Morgane est la tutrice légale de Yonah et Roman son subrogé tuteur, comme le souhaitait leur mère. Avec les fonds récoltés par la cagnotte, Roman a fondé l’association Pré-Care, qui permet de soulager Morgane de la prise en charge de sa petite sœur. “Injecter les 70 000 € dans une association nous permet d’être transparents vis à vis de ceux qui nous ont aidés concernant leur utilisation.” Ils ont ainsi pu rembourser les dettes laissées par leurs parents et payer les frais d’internant de Yonah à l’internat. “Sur les réseaux sociaux, on entend parler de nous comme d’une success story. Mais en réalité, on a simplement pu normaliser une situation très précaire. Et depuis le décès de notre mère, on n’a reçu aucun soutien de la part de l’État.”, déplore Roman Malo.

Devenir orphelin alors que tu es déjà dans la précarité, c’est activer un mode survie 

Il y a quelques semaines, Morgane se voit retirer son droit à la CAF de 200 € sans explication. “Comment comprendre pourquoi on te refuse une aide financière alors que tu es orpheline, boursière, étudiante et que tu as une enfant à charge ? D’ailleurs elle n’est même pas considérée comme le dernier échelon de la bourse. Que faut-il de plus pour y accéder ?” Pour s’en sortir, Morgane travaille (pour un salaire de 400 € par mois) en dehors de ses heures de cours car sa bourse d’étudiante de 450 € ne lui permet pas de survivre  “Perdre un parent lorsque tu as de la famille et un héritage, c’est déjà très dur alors devenir orphelins lorsque tu vis dans la précarité, c’est activer un mode de survie. » 

Notre situation est loin d’être anecdotique 

Pour améliorer l’accompagnement des orphelins en France, la fratrie a présenté des propositions concrètes à plusieurs politiques. « On demande notamment la création d’un fond de solidarité d’urgence pour les situations exceptionnelles comme la nôtre. », explique Roman. Pour le moment, aucune retombée en vue. « Nous savons lire et écrire. Tous les orphelins de France n’ont pas cette chance. Que sont-ils supposés faire lorsqu’ils perdent un ou deux parents ? Comment savoir vers qui ils doivent se tourner ? » Selon l’OCIRP, il y aurait 800 000 orphelins de moins de 25 ans en France. Il est plus que temps d’agir.

En septembre dernier, Roman Malo, 26 ans, publie le livre Nous n’avions pas d’argent mais nous avions de l’amour aux éditions Albin Michel. Il y raconte le chemin parcouru avec ses sœurs, Morgane et Yonah depuis la mort de leurs parents. 

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Commentaires

  • Arno
    Arno
    Le 24/11/22

    Quel courage, c’est très inspirant.

Un commentaire

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