Ne dites pas : mourir ; dites : naître. Croyez.
 On voit ce que je vois et ce que vous voyez ;
 On est l’homme mauvais que je suis, que vous êtes ;
 On se rue aux plaisirs, aux tourbillons, aux fêtes ;
 On tâche d’oublier le bas, la fin, l’écueil,
 La sombre égalité du mal et du cercueil ;
 Quoique le plus petit vaille le plus prospère ;
 Car tous les hommes sont les fils du même père ;
 Ils sont la même larme et sortent du même oeil.
 On vit, usant ses jours à se remplir d’orgueil ;
 On marche, on court, on rêve, on souffre, on penche, on tombe,
 On monte. Quelle est donc cette aube ? C’est la tombe.
 Où suis-je ? Dans la mort. Viens ! Un vent inconnu
 Vous jette au seuil des cieux. On tremble ; on se voit nu,
 Impur, hideux, noué des mille noeuds funèbres
 De ses torts, de ses maux honteux, de ses ténèbres ;
 Et soudain on entend quelqu’un dans l’infini
 Qui chante, et par quelqu’un on sent qu’on est béni,
 Sans voir la main d’où tombe à notre âme méchante
 L’amour, et sans savoir quelle est la voix qui chante.
 On arrive homme, deuil, glaçon, neige ; on se sent
 Fondre et vivre ; et, d’extase et d’azur s’emplissant,
 Tout notre être frémit de la défaite étrange
 Du monstre qui devient dans la lumière un ange.
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Victor Hugo
