Le premier cimetière écologique de Paris ouvre ses portes


Le concept de cimetière écologique n’est pas réservé à la campagne, c’est maintenant au tour de Paris. L’espace dédié aux inhumations écologiques au sein du cimetière d’Ivry (Val-de-Marne), à côté du 13e arrondissement, vient d’ouvrir ce jeudi. La Mairie de Paris avait voté sa création le moi de juillet dernier. Ce n’est pas une première en France puisque Niort avait déjà mis en place une telle initiative. La mesure, applicable dès septembre, répond aux demandes de plus en plus nombreuses de funérailles écologiques. La ville de Paris interdit déjà depuis 2015 l’usage des pesticides dans ses cimetières.

Le cahier des charges du cimetière écologique de Paris

Pour y avoir une place, les familles et les sociétés de pompes funèbres devront s’engager à suivre un règlement rigoureux pour respecter l’environnement.

L’inhumation aura lien en pleine terre. Finis les monuments funéraires en granit importé et les caveaux en béton. Leur construction constitue une intrusion agressive de la nature qui demande des machines, de l’énergie et des matériaux qui marquent les sols des centaines d’années durant. Dans ce cimetière écologique, les professionnels creuseront à la main et la pierre et le béton seront remplacés par des stèles en bois d’essences françaises ou issu de forêts proches de Paris.

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Pas de thanatopraxie non plus. Les formaldéhydes hautement cancérigènes, injectés pour retarder la composition du corps, mettent en danger la santé des personnes qui pratiquent ce soin. Ils se répandent ensuite dans les sols après la mise terre et contaminent les nappes phréatiques. L’inhumation écologique interdit l’usage du formol ou ses dérivés. Les soins du corps du défunt devront se limiter à la toilette mortuaire.

Toujours pour réduire l’impact, on favorisera les cercueils et les urnes écologiques en bois ou en carton, sans capiton synthétique, ni peinture, ni vernis. De même, le cahier des charges impose d’habiller le défunt en fibres naturelles. « Tout ce qu’on met dans le cercueil finit en pleine terre », explique Manon Moncoq, anthropologue spécialiste du funéraire et de l’environnement qui a travaillé sur ce projet. « C’est comme si on jetait en pleine nature un pull, des bijoux ou des objets personnels. C’est très intéressant pour le rituel mais cela aura beaucoup de mal à se dégrader. En enterrant le défunt avec un simple linceul en fibres naturelles, ou même nu si on veut réduire son empreinte le plus possible, on limite la saturation en déchets du cimetière. »

Une nouvelle croyance

Cette volonté de rendre le cimetière plus écologique répond à une tendance de fond, et pas seulement à Paris. On peut citer l’exemple du cimetière vert de Niort ou de la forêt cinéraire dans les Pyrénées.

« Il y a vraiment eu un bouleversement des représentations depuis quelques années » souligne l’anthropologue Manon Moncoq. Elle écrit actuellement une thèse sur les funérailles vertes et l’analyse anthropologique d’un nouveau rapport au corps, à la mort et à l’environnement. « Pour la première fois dans l’histoire de l’Homme, des personnes ont imaginé d’autres moyens de sépultures que l’inhumation et la crémation. Je pense à des procédés comme l’aquamation, la promession, ou même à la légalisation de l’humusation dans l’État de Washington. On accepte de rendre le corps humain fertile. La sacralité du corps se redéfinit dans la logique de la réflexion sur le recyclage. On pense à réinjecter le corps dans le cycle de vie alors que pendant des millénaires, le corps était sacré. Avant, on le plaçait dans une tombe pour y demeurer des milliers d’années. Aujourd’hui, on veut rendre à la terre ce qu’elle nous a donné, pour se dédouaner de l’impact qu’on a eu sur l’environnement. Cette nouvelle croyance trouve son paroxysme dans la mort, le dernier geste réalisé de son vivant. »

Une extension progressive

Que ceux qui tiennent encore à leur pierre tombale se rassurent. Le vote d’aujourd’hui ne concerne que 1560 mètres carrés de terrains, soit 157 concessions. Malgré leur rareté, celles-ci coûtent moins cher que des concessions classiques : 294€ l’emplacement vert pour dix ans contre 376€ pour les autres. Si la mairie prévoit d’aménager des espaces similaires à Thiais (Val-de-Marne) en 2020, puis à Bagneux (Hauts-de-Seine) et à Pantin (Seine-Saint-Denis), tous les cimetières de Paris n’ont pas encore vocation à devenir écologiques à 100%.


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