Sandra Meunier, leçon d’amour d’une fée à des soignants


Hier, j’ai rencontré une fée. Elle s’appelle Anabelle. Dans la vraie vie, c’est Sandra Meunier.

Sandra Meunier est art-thérapeute et a suivi pendant 13 ans un enseignement en thérapie corporelle et énergétique mêlé à un travail sur la conscience. En 2002, fraîchement diplômée en art-thérapie, elle commence à travailler en service de neurologie à l’hôpital. Pas simple d’apaiser les patients, elle décide de venir en clown. Les patients pleurent, rient, se confient à elle. Sandra choisit alors d’adopter à 100% le personnage de la fée Anabelle pour faciliter le contact et les toucher au cœur. Elle intervient aujourd’hui en gériatrie, cancérologie et en soins palliatifs. Depuis, elle a formé d’autres Neztoiles à cette discipline. Ils sont huit en France, aujourd’hui à distribuer du bonheur aux malades.

Hier, Sandra Meunier intervenait dans un hôpital parisien pour sensibiliser les soignants à l’importance de la relation. Alors qu’elle enfilait sa tenue de Neztoile, un personnage joyeux et féerique, et terminait ses finitions maquillage, elle me confiait que le message passait mieux ainsi.

Dire un vrai Bonjour, un Bonjour d’humanité

Dans une salle de formation, une vingtaine de soignantes, la plupart infirmières, forment un cercle. Elles ont entre 25 et 40 ans. Que des femmes. Anabelle fait irruption dans la pièce, annonce la couleur : « Je suis Docteur de l’amour et je suis là pour vous donner un cours de création de joie ». Elle teste la capacité des soignantes à se laisser approcher physiquement. Quelle est la bonne distance ? « Si je suis là, je suis trop près de toi ? Et là, je te gêne, là ? » Elle devance leurs pensées, aborde d’emblée une de leurs principales difficultés : le manque de temps.

« Même en deux minutes, tu peux créer du lien. Etre en lien, c’est que tu souhaitais faire quand tu as choisi d’être soignant, non ? Dire bonjour, un vrai bonjour, ça ne prend pas de temps. Pas un bonjour en mode automatique. Un bonjour de rencontre, d’humanité, tu vois ? »

Elle est étonnante. Elle va au contact. Elle surprend l’une des soignantes, les bras croisés, l‘invite à s’ouvrir, à respirer. Elle sait à quoi ressemble leurs journées : la cadence infernale, le manque de personnel et à quel point leur quotidien peut être stressant. Malgré tout, elle insiste :

« Ouvre et donne. Même en sous effectif, même quand t’as l’impression de travailler à la chaîne, n’oublie pas pourquoi tu es là »

Pour ça, elle passe en revue les « voyages » qu’elle a dans sa besace. Ceux qu’on peut offrir facilement aux patients. Sans dépenser d’argent, sans bien les connaître, en quelques minutes.

«Faites-les respirer. Respirez avec eux.

Offrez-leur un sourire, un mot.

Vous pouvez leur faire (re)vivre des joies. Posez-leur des questions.

« C’est quoi votre passion dans la vie ?

« Où est-ce que vous êtes le plus heureux ?

« C’est quoi votre film préféré ? Et la musique que vous aimez écouter ? 


Oubliez les soins mécaniques, préférez la médecine holistique

« Oubliez les soins, les gestes mécaniques. Soyez dans la médecine holistique. Elaborez votre petit questionnaire de l’être. C’est comme ça que vous pourrez offrir des parenthèses enchantées aux patients. Emmenez-les, loin, à la montagne, sur une gondole à Venise. Ecoutez-les, percevez ce qu’ils aiment et faites les rêver. »

Anabelle raconte aux soignants quelques une de ses interventions. Des histoires simples. Courtes. Des moments de grande humanité où l’on se plaît à visualiser le sourire qu’elle a provoqué ou encore l’apaisement profond du patient après son départ.

Elle raconte Germaine, 85 ans. En phase terminale d’un cancer. Germaine est en colère. Sa fille ne lui rend pas assez visite. Elle voudrait la voir tous les jours. Anabelle lui propose de l’emmener hors de sa chambre, et de la promener. Germaine accepte. En poussant sa chaise roulant, Anabelle chante. Germaine, aussi, se met à fredonner puis à chanter. Sa fille arrive. « Maman ça va ? Je ne t’avais pas vu chanter depuis si longtemps ».

On devine le bonheur dans les yeux de la fille et de la mère.

Donnez de la joie aux patients

« Ne rentrez pas dans la colère de l’autre. Ne soyez pas dans la plainte ou l’apitoiement. Essayez plutôt de donner de la joie aux patients. Amenez-les à changer d’émotion. Cela peut passer par un morceau de musique diffusé dans sa chambre parce que le patient l’a évoqué la semaine dernière, vous pouvez lui prendre la main, l’inviter à fermer les yeux et le faire danser grâce à des légers mouvements. »

Elle nous invite justement à vivre ce moment. Munie de son enceinte portative, elle lance un morceau d’accordéon. Et me voilà main dans la main avec ma voisine. Si au départ, j’éprouve un peu de gêne, je ferme les yeux, et me laisse emporter par le rythme. Je pars, loin.

« On pense aux chansons que l’on veut passer à son enterrement. Jamais à celles qui nous berceront avant de mourir. 

Tiens, et si on parlait de la mort ?

 

Car même pour les soignants, Sandra Meunier l’a observé : la mort est un tabou. Elle est souvent synonyme d’échec pour l’équipe soignante et a peu de place dans les discussions. De quel espace de parole disposent-ils pour l’évoquer ?

Après nous avoir amenés à vivre tout en douceur, les yeux fermés, notre propre mort, elle prend le pouls de l’assemblée.

« Et votre BNF, votre bonheur intérieur profond, il en est où  ?

Les soignantes font savoir qu’il se porte plutôt bien.

Rien ne vous empêche de mettre cette joie dans votre métier. Au contraire, ça donne du sens à vos journées. En souriant à vos patients, vous leur donnez de l’amour… »

Découvrez le travail de Sandra Meunier sur son site. Elle organise une tournée de son spectacle A mourir de joie dans toute la France, et en Europe. Pour soutenir l’intervention des Neztoiles en établissement de santé, afin que chaque patient souffrant de maladie grave puisse être reconnecté à de la joie, vous pouvez faire un don ici.

À écouter : L’Homme Étoilé, infirmer en soins palliatifs raconte sa vie en BD sur Instragram


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