Assises du deuil : « Accompagner le deuil au travail n’est pas une option »


Le deuil, un sujet tabou au travail qui mobilise peu les entreprises

 « Après la mort soudaine de mon mari, mon entreprise m’a mise à l’écart puis j’ai été harcelée d’appels pour connaître ma date de retour avant d’être licenciée. J’ai l’impression d’avoir été trompée », raconte Annick Ahyi-Johnson consultante. Cette double peine, elle est loin d’être la seule salariée à l’avoir subie en France. D’après la dernière enquête du Crédoc, 80 % des actifs en deuil n’ont reçu aucun soutien des services RH de leur travail ou l’ont jugé inutile ou inadapté. Un chiffre alarmant révélé lors des dernières Assises du deuil. « Le deuil n’est pas qu’une affaire intime. L’employeur doit avoir les outils pour adopter le bon comportement avec un salarié en souffrance », souligne Marie Tournigand, déléguée générale de l’association Empreintes.


70% des actifs en deuil n’ont reçu aucun soutien, ou alors inadapté, de la part de leur direction

Les répercussions physiques et psychiques de la perte d’un proche sont loin d’être anodines. En effet, près d’un salarié sur quatre ressent des difficultés d’attention, de concentration, d’épuisement et d’irritabilité suite à un deuil. A cela s’ajoute souvent, lors du retour en entreprise, des remarques maladroites ou un silence pesant des collaborateurs qui accentue le sentiment de solitude. Pourtant, la reprise du travail aide les salariés dans 76% des cas. « Il est important de prendre chaque deuil en main de façon individuelle, sans créer de norme de durée, ni de culpabiliser le salarié par l’injonction à “aller bien et vite”, ajoute Marie Tournigand. Parmi les propositions de l’association Empreintes figure la nomination et la formation de personnes référentes en entreprise, des personnes “ressources”, à même d’accompagner l’actif endeuillé et de lui proposer différents outils pour l’aider dans son deuil. Ces référents pourront ainsi coordonner les actions mises en place au sein de l’entreprise. Autre piste plébiscitée par un tiers des actifs en deuil : la possibilité de s’entretenir avec un psychologue, lors du retour à l’emploi ou avec son employeur.

Pour trouver des pistes d’accompagnement lors d’un deuil, vous pouvez consulter notre guide sur le sujet.

Le deuil n’est pas une maladie

Le deuil doit aussi être déstigmatisé. Il est encore trop souvent associé à une maladie. On le constate avec l’obligation de prendre un arrêt maladie pour prolonger ses congés après un deuil. D’ailleurs, l’absentéisme au travail lié à un deuil est passé en deux ans de 43% à 67 % et la durée moyenne des arrêts de travail lors d’un deuil est de 34 jours. La mise en place d’un congé de deuil généralisé, comme celui qui a été voté suite pour le deuil d’un enfant de moins de 25 ans, pourrait être une solution.

Lire notre interview d’Hélène Romano, qui plaide pour la mise en place d’un congé de deuil.

Deuil d’un collègue