Deepfake : Thierry Ardisson ressuscite Dalida dans l’Hôtel du Temps


Lundi 2 mai était diffusée sur France 3 la première édition de l’émission “Hôtel du Temps”, de Thierry Ardisson. L’animateur s’était lancé le défi de bluffer les téléspectateurs en ressuscitant les morts les plus célèbres. C’est un pari réussi, grâce à la technologie du deepfake. Durant près d’une heure et quarante sept minutes, Thierry Ardisson interview Dalida, trente cinq ans après sa disparition, en 1987. Les deux prochaines personnalités “mortes-vivantes” interviewées dans le cadre de l’émission ont déjà été annoncées. Il s’agira de Jean Gabin et de la princesse Lady Diana. Oui, vous ne rêvez pas ! On vous explique.

La technologie du deepfake « invite » Dalida sur le plateau de l’Hôtel du Temps

La présence de Dalida sur le plateau de l’émission est le fruit d’une prouesse technologique déjà en vogue dans le milieu cinématographique : le deepfake. En 2016, les producteurs de Star Wars Rogue One avaient recouru à ce procédé d’intelligence artificielle pour ressusciter Peter Cushing dans son rôle du Grand Moff Tarkin. Une pratique qui n’avait pas fait l’unanimité car la technologie n’était pas encore assez développé. Le résultat n’avait pas été assez satisfaisant pour bluffer les fans. Quelques années plus tard, « l’Hôtel du Temps » de France 3 peut compter l’amélioration des procédés de Face Engine et Voice Cloning. La renaissance de Dalida à l’écran est spectaculaire.

La silhouette de l’actrice Julie Chevallier, qui jouait le rôle de Dalida le temps du tournage de l’émission, a servi de base. L’Institut de recherche et coordination acoustique/musique n’a eu qu’à cloner la voix si particulière de Dalida, et la société Mac Guff (société de production de Moi, Moche et Méchant) a reproduit son visage pour (re)donner vie à la chanteuse sous les yeux des téléspectateurs. Le résultat est bluffant.

 


Deepfake : Et l’éthique dans tout ça ?

Thierry Ardisson, qui signe son retour à la télévision avec “Hôtel du Temps”, a fait l’objet de vives critiques. Qui peut décider de ressusciter une personnalité décédée pour réaliser une interview dont l’équipe de production est maître des questions ET des réponses ? Peut-on mettre en scène dans son bain une chanteuse morte depuis 35 ans ? Selon Thierry Ardisson, les réponses de Dalida sont uniquement basés sur des propos qu’elle a tenu de son vivant. « J’ai une pile de verbatims sur mon bureau, et je dois tricoter une discussion », se défend-il sur le plateau de C à vous. Ainsi, l’émission s’apparenterait plus à un documentaire 2.0, dans lequel il retrace le parcours de vie atypique de Dalida, en sa présence.

Laurence Devillers, professeur en intelligence artificielle à la Sorbonne/CRNS et auteure du livre « Les robots émotionnels : et l’éthique dans tout cela », s’inquiète toutefois du manque de réglementation et de normes autour de cette technologie. Selon elle, cela pose un vrai problème éthique. « Le deepfake permet à n’importe qui d’usurper une identité. On peut alors faire dire des choses à une personne qu’elle n’aurait jamais prononcé », alerte-t-elle. “Il faut engager une réflexion éthique et approfondie afin d’éviter les abus”. Ainsi, que penser de Dalida qui demande si François Mitterand a assisté à son enterrement pour conclure l’émission ?

Finalement, la réalisation d’un documentaire vaut-elle vraiment la peine de déranger les morts ? À méditer…

Pour en savoir plus : Robots, avatars, IA… Demain, serons-nous tous E-ternels ?


DeathtechInnovation